Genre tsé…..

J’émerge lentement d’une période durant laquelle j’ai travaillé sur une demande de subvention. Le travail de chercheur scientifique est très diversifié et intéressant et l’une des choses les plus importantes à faire est de trouver les fonds nécessaires pour entreprendre nos études scientifiques. Alors, j’ai passé une bonne partie du temps des fêtes et du mois de janvier à travailler sur une demande de subvention qui devait être soumise à la mi-février. Je tente de reprendre contrôle sur mon agenda depuis ce temps!

On pourrait avoir pitié de moi et dire que je travaille trop. Niet.

J’ai a-do-ré cette période où j’ai appris une tonne de nouvelles choses et où j’ai pu penser à 400 km/heure pendant des jours et des jours. J’étais en vacances avec ma fille en bord de mer. Et lorsqu’elle dormait le matin, j’écrivais et je travaillais sur la demande de subvention. Quand elle se réveillait, on partait à la plage. Pendant qu’elle se prélassait au soleil en lisant une revue, je lisais des articles scientifiques en prenant des notes sur mon cellulaire. Quand ma fille voulait aller marcher, je lâchais tout et partais avec elle. Et j’ai oscillé comme cela entre ce travail qui me passionne et le temps de qualité avec mes enfants et mon conjoint pendant tout le temps des fêtes.

Et j’ai soumis une demande de subvention portant sur l’impact du sexe et du genre sur la réponse de stress.

….Parce qu’il y une différence entre le terme de ‘sexe’ (au sens de ‘différence sexuelle’) et le terme de ‘genre’.

Le ‘sexe’ réfère à toute différence entre les hommes et les femmes qui est liée à des facteurs biologiques. Les femmes produisent de l’estrogène et de la progestérone, tandis que les hommes produisent de la testostérone. Certaines différences qu’on observe entre les hommes et les femmes sont liées à des effets de sexe. Par exemple, on sait que la réactivité au stress chez la femme peut varier en fonction de son cycle menstruel. C’est dans la phase lutéale (juste avant les menstruations; période aussi associée au syndrôme pré-menstruel) que les femmes réagissent le plus fortement au stress. J’en vois déjà certaines d’entre vous hocher la tête en se disant : ‘Aaaahhh! C’est pour ca que j’ai la mèche si courte à certaines périodes de mon cycle menstruel!’.

Le ‘genre’ réfère à toute différence entre les hommes et les femmes qui est liée à des facteurs sociaux. Ainsi, les petites filles jouent à la poupée pendant que les garçons jouent avec des camions. On habille les petites filles en rose, les petits garçons en bleu. Les petites filles doivent être féminines et douces, tandis que les petits garçons doivent être masculins et forts.

Quand un enfant ou un adolescent ne rencontre pas ces attentes sociales liées au genre, on dit qu’il montre une ‘non-conformité au genre’. Les personnes qui sont non-conformes au genre sont souvent stigmatisées ou jugées par les autres et ceci peut leur causer du stress à long-terme. Des études ont montré que chez les adolescents, la non-conformité au genre est associée à de la victimisation par les pairs et à un stress accru pouvant parfois mener à des symptômes dépressifs et des idées suicidaires.

On n’a pas besoin d’aller très loin ou d’être fortement victimisé pour voir apparaître les stigmas liés à la non-conformité de genre. Ma fille de 17 ans, à qui j’ai appris l’importance de bien assumer son identité et ses choix, s’est parfois fait dire par ses petits copains qu’elle avait ‘trop de caractère’ et n’était pas ‘assez douce’. Deux de mes nièces de 12 et 15 ans sont ceinture noire de karaté et font parfois peur aux garçons. Mais ceci ne les empêche pas de se faire les ongles à la maison en revenant du cours de karaté :).

La stigmatisation en fonction du genre ne survient pas seulement chez les filles. Mon fils de 15 ans m’a récemment fait la leçon là-dessus, et avec raison. En effet, fiston m’a un soir accusée d’être ‘misandre’ (c’est vraiment le terme qu’il a utilisé!) après que j’aie grommelé de frustration entre les dents un ‘Ah! ces fichus mecs! Tous pareils!’. J’ai demandé à fiston ce que voulait dire le mot ‘misandre’. Il m’a dit de regarder dans le dictionnaire…. J’ai alors appris que le terme de misandre référait à quelqu’un qui montre du mépris envers le sexe masculin (l’inverse de misogyne quoi!). Quelle leçon de vie! Mesdames! Demandons-nous combien de fois nous avons été quelque peu misandres et l’impact de nos mots…. sur nos fils et nos filles!

En lisant la littérature scientifique et en jasant avec des experts dans le domaine pour écrire ma demande de subvention, j’ai appris qu’une chose très intéressante est en train d’arriver avec la notion de genre dans la nouvelle génération d’adolescents. La notion est en train de s’effacer et de devenir ‘fluide’. On parle maintenant de fluidité de genre. La nouvelle génération de jeunes refuse maintenant haut et fort toutes les attentes sociales qui sont liées au sexe et/ou au genre. Les jeunes se donnent maintenant le droit d’être féminin un jour, masculin l’autre jour, et androgyne quand ils le désirent. Ils se donnent le droit d’être attiré(e) par quelqu’un du même sexe ou de l’autre sexe. Ils désirent maintenant être attiré(e) par une personne, sans égard à son sexe.

Certaines universités ont même bâti des salles de bains pour transgenres, c-à-d. pour les personnes qui ne sont pas encore totalement certaines de leur genre. Quand on est dans un corps de femme mais qu’on se sent comme un homme à l’intérieur de notre tête, dans quelle salle de bain va-t-on faire ses besoins? Dans une salle de bain de personnes transgenres.

Certains parents qui lisent ce blogue pourraient se dire que ce n’est pas vraiment important de parler et d’étudier les facteurs liés au genre et qu’on devrait mettre notre argent ailleurs. Je leur dirais que je ne suis pas d’accord avec eux et voici pourquoi. Mon laboratoire a mis sur pied certains programmes de psychoéducation pour aider les jeunes à bien négocier leur stress. Nous avons validé ces programmes auprès de jeunes mais sans prendre en compte les facteurs liés au genre qui pourraient modifier leur réponse au programme. Réagit-on de la même façon à un programme d’éducation sur le stress à l’adolescence quand on fait face à de la stigmatisation parce qu’on est homosexuel ou que l’on est hétérosexuel mais un peu effeminé? Est-ce que les exemples de stress qu’on présente aux jeunes les rejoignent tous de la même façon ou ne rejoignent-ils que les jeunes hétérosexuels? Est-ce qu’un programme d’éducation sur le stress devrait être personnalisé pour les personnes présentant des genres différents dans le but de permettre à ces personnes de bien s’identifier aux informations transmises? Utilise-t-on les bons moyens pour rejoindre la réalité de tous les adolescents, sans égard à leur sexe et à leur genre?

Je crois que non.
Et un nombre significatif d’adolescents aux prises avec des problèmes de genre souffrent en silence et parfois même se suicident. On doit donc travailler pour eux.

C’est pourquoi j’ai passé le temps des fêtes à écrire cette demande de subvention.
On se croise maintenant les doigts pour savoir si on aura les sous pour faire l’étude. :)). Je vous tiendrai au courant.

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